Je réprouve la hiérarchie

– Je réprouve la hiérarchie […] Je ne vous parle pas de la hiérarchie humaine, je vous parle de celle séparant les hommes et les animaux. Nous nous croyons supérieurs.
– Nous le sommes.
– En quoi ? Les animaux se nourrissent mais ne déclenchent pas de guerres. Les animaux se battent mais ne se torturent pas. Les animaux respectent les forêts, au lieu de les détruire, pour y coucher des villes et des pavés. Ils n’enfument pas les nuages, ils demeurent discrets, à leur place.
– Tu les idéalises. Par exemple, ils se volent les uns les autres.
– Soit, mais un terrier ou une pomme leur appartiennent dans la mesure où ils s’en servent. As-tu jamais vu un oiseau posséder plusieurs nids ? Ou un renard repu surveiller une carcasse qu’il ne mangera pas ? Il n’y a pas de riches, chez les animaux, aucun n’entasse des biens surnuméraires, des fortunes dont il ne profite pas.

Éric-Emmanuel Schmitt
(La femme au miroir)


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