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« Le publicain… n’osait même pas lever les yeux vers le ciel »

A propos de la parabole du pharisien et du publicain (Luc 18, 9-14.) :     

pharisien-et-publicainQuel est le vase où la grâce se déverse de préférence ? Si la confiance est faite pour recevoir en elle la miséricorde, et la patience pour recueillir la justice, quel récipient pourrons-nous proposer qui soit apte à recevoir la grâce ? Il s’agit d’un baume très pur et il lui faut un vase très solide. Or quoi de plus pur et quoi de plus solide que l’humilité du cœur ? C’est pourquoi Dieu « donne sa grâce aux humbles » (Jc 4,6) ; c’est à juste titre qu’il « a posé son regard sur l’humilité de sa servante » (Lc 1,48). À juste titre parce qu’un cœur humble ne se laisse pas occuper par le mérite humain et que la plénitude de la grâce peut s’y répandre d’autant plus librement…

Avez-vous observé ce pharisien en prière ? Il n’était ni un voleur, ni injuste, ni adultère. Il ne négligeait pas non plus la pénitence. Il jeûnait deux fois par semaine, il donnait le dixième de tout ce qu’il possédait… Mais il n’était pas vide de lui-même, il ne s’était pas dépouillé lui-même (Ph 2,7), il n’était pas humble, mais au contraire élevé. En effet, il ne s’est pas soucié de savoir ce qui lui manquait encore, mais il s’est exagéré son mérite ; il n’était pas plein, mais enflé. Et il s’en est allé vide pour avoir simulé la plénitude. Le publicain, au contraire, parce qu’il s’est humilié lui-même et qu’il a pris soin de se présenter comme un vase vide, a pu emporter une grâce d’autant plus abondante.

Saint Bernard (1091-1153), moine cistercien et docteur de l’Église
3e sermon sur l’Annonciation, 9-1

La prière du pauvre traverse les nuées

Être chrétien, c’est ne même pashumilite arriver à lever les yeux au ciel et cependant, laisser jaillir de son coeur la joie et le regret, la crainte de ne jamais arriver à être saint et l’espoir de le devenir quand même. C’est toucher une statue, faute de mieux, allumer une bougie, pousser un soupir, murmurer un « Je vous salue Marie » ; c’est déverser le fardeau en vrac parce qu’il est devenu trop lourd, c’est tout confier sans ordre, sans méthode, sans précaution.

C’est dire à Dieu : « Je suis là. Prends-moi dans ta miséricorde. J’ai quinze ans, vingt ans, quarante ans, soixante, plus. Je ne sais pas très bien ou j’en suis, ou bien je le sais trop. Mais prends-moi dans ta miséricorde. Je ne suis pas digne de toi, Seigneur, mais sans toi, je ne peux pas avancer. »

Car cette prière-là, cette prière nue, cette prière fondamentale, la plus pauvre qui soit, déchire les nuées et saisit le coeur de Dieu. N’ayez pas peur de votre prière. Laissez-la jaillir librement. Un père n’attend qu’une chose de ses enfants, si loin qu’ils soient de lui : qu’ils l’appellent. Alors, de son coeur touché comme par une lance, jaillit sa force et son amour, et sa joie.

Homélie du Frère Yves Combeau, dominicain
Messe du dimanche 23 octobre 2016
en direct de l’église Sainte-Jeanne-d’Arc
à Rennes (Ille-et-Vilaine)