Si parfois quelque douleur intime, quelque doute cuisant, quelque peine intense vous désespère et vous abat, il est un moyen infaillible pour regagner le calme et la paix.
Dans les profondeurs de notre être brille une lumière dont seule la pureté égale l’éclat, une lumière, parcelle vivante et consciente d’une divinité universelle, animant, réchauffant, éclairant la matière, guide puissant et infaillible pour ceux qui veulent écouter sa loi, aide plein de réconfort et de tendre indulgence pour ceux qui aspirent à le voir, l’entendre et lui obéir. Aucune aspiration sincère et durable ne peut être vaine vers lui ; aucune confiance respectueuse et forte ne peut être déçue ; aucune attente n’est trompée.
Mon coeur a souffert et gémi, prêt à se rompre sous la douleur trop lourde, prêt à sombrer sous la peine trop forte… Mais je t’ai appelé, divin consolateur, j’ai prié ardemment vers toi, et la splendeur de ta lumière éclatante m’est apparue et m’a revivifiée.
Tandis que les rayons de ta gloire pénétraient, éclairaient tout mon être, j’ai perçu nettement le chemin à suivre, l’utilité à tirer de la souffrance ; j’ai compris combien la douleur qui m’étreignait était un pâle reflet de la douleur terrestre, abîme de souffrances et d’angoisses.
Seuls ceux qui ont souffert peuvent comprendre la souffrance des autres, la comprendre, communier avec elle et la soulager. Et j’ai compris, divin consolateur, Holocauste sublime, que pour pouvoir nous soutenir dans toutes nos peines, nous apaiser dans toutes nos angoisses, il faut que tu aies connu, ressenti toutes les souffrances de la terre et de l’homme, toutes sans exception.
Comment se fait-il que parmi ceux qui se disent tes adorateurs, il s’en trouve qui te regardent comme un bourreau cruel, assistant en juge inexorable à des tourments tolérés par toi, sinon créés de ta propre volonté.
Non, j’entrevois maintenant que ces souffrances proviennent de l’imperfection même de la matière, inapte à te manifester dans son désordre et sa grossièreté ; et tout le premier tu en souffres et tu en gémis, tu luttes et tu peines dans ton ardent désir de transformer le désordre en ordre, la souffrance en bonheur, le désaccord en harmonie.
La souffrance n’est point une chose obligatoire, ni même désirable, mais lorsqu’elle vient vers nous, comme elle peut être utile !
Chaque fois que l’on sent son coeur se briser, une porte plus profonde s’ouvre en soi, découvrant des horizons nouveaux et toujours plus riches en trésors cachés, qui viennent de leur influx doré redonner une nouvelle et plus intense vie à l’organisme prêt à s’anéantir.
Et quand, par ces descentes successives, on atteint le voile qui te découvre en se levant, ô Seigneur, qui peut dire l’intensité de Vie pénétrant tout l’être, l’éclat de la Lumière qui l’inonde, la sublimité de l’Amour qui le transforme à jamais.
Mère, 1910 – « Paroles d’Autrefois »
Le secret vers lequel conduit la douleur.
« Par la douleur et le chagrin, la Nature rappelle à l’âme que les plaisirs dont elle jouit sont seulement un faible reflet de la joie réelle de l’existence. Chaque souffrance, chaque torture de notre être contient le secret d’une flamme d’extase devant laquelle nos plus grandes jouissances sont comme des lueurs vacillantes. C’est le secret qui fait l’attraction de l’âme pour les grandes épreuves, pour les souffrances et les expériences terribles de la vie, alors même que notre mental nerveux les abomine »
(Sri Aurobindo, Aperçus et Pensées)